ARCHIVES DES 15 ANS

La notion d’archive est un des éléments fondateurs de l’invention de l’écriture avec le besoin de garder des traces. Traces de comptabilité, de récolte ou d’alliance d’individus. Ces traces de « ce qui a été » permet d’élever le niveau d’abstraction de la pensée en le déchargeant d’informations à mémoriser, mais aussi d’ouvrir la porte à la possibilité d’appliquer une historicisation plus empirique de sa société qu’auparavant. Au fil du temps et des progrès technologiques, l’archive s’est développée pour devenir bibliothèques et fonds d’archives institutionnalisés, pierres d’échoppes d’une grandes parties de nos savoirs. Aujourd’hui, nos archives sont même en pleine transformation car ce n’est plus un simple stockage de l’information, mais une accumulation titanesque des faits et gestes numériques de tout en chacun qui, dans de subtils entrecroisements algorythmiques, ouvrent la voie à un devenir à court terme.
Peu importe sa forme – papier, sonore, vidéo, numérique (sur mémoire « morte », vive ou sur le cloud) – la notion d’archive est centrale dans notre société empirique où sa consultation est à la base de n’importe quelle action entreprise.

Pour la quinzième édition du LUFF, nous nous sommes lancés dans une trituration à grande échelle de toutes les archives du festival que nous pouvions obtenir. Après de longs mois de recherches sur disques durs, serveurs, plateformes, classeurs, boîtes en carton et carnets de notes, nous avons massivement investis le hall du Casino de Montbenon, ses entrées, ainsi que la chapelle Guillaume Tell faisant face au bâtiment avec ce matériel. Nous les bidulons, les tordons. En se les appropriant de la sorte, nous en créons de nouvelles où le vrai et le faux n’a pas sa place car elles sont.

En plus des installations, nous avons créé un bureau des archives où nous produisons chaque soir du festival un fanzine. Chaque exemplaire est unique car produit à l’aide d’archives brutes récoltées, ainsi que d’archives remaniées. Ce bureau des archives évoque la folie bureaucratique avec des piles de papiers, des tampons, une imprimante, des téléphones, de l’encre, des marqueurs, un massicot, bref, tout ce qui est nécessaire pour produire des fanzines totalement dégénérés. L’obtention d’un fanzine se réalise à la manière du don contre-don; la personne doit écrire un souvenir du festival sur une machine à écrire mise à disposition, puis donner ce papier – marque de fabrique que l’on retrouve sur tous les fanzines – afin de recevoir un fanzine. La personne ne reçoit jamais son propre souvenir. Un collectif différent est invité chaque soir pour la production des fanzines.

Un enregistreur à noise, une piratbox émettant un wifi libre dans le Casino et remplie d’archives numériques, une scène pour les groupes se produisant dans le cadre du festival L’OFF, des installations extérieures, des bornes signalétiques, le projet Archives des 15 ans a débordé dans tous les sens tant les idées du collectif déferlaient à chacune de leurs rencontres.

Collectif des Archives des 15 ans

Direction artistique:
Romain Berger
Antón de Macedo

Penseurs, constructeurs, faiseurs:
Mathias Antionetti
Anaëlle Clot
Simon De Castro
Stanislas Delarue
Nicolas Favrod-Coune
Havall Imfeld
Laure Imfeld
Léon Jodry
Yannick Lieber
Manon Roland
Kevin Schlösser
Louis Schneider
Gabriel Sidler

photos: 1, 3, 7 Alex Sys, 2 Nirine Arnold, 4 Jujudellago Photoreports, 5 Raphaël Piguet, 6 Marika Barman

© Antón de Macedo – 2016